Le sol, voilà une
notion qui parle au jardinier : une terre qu'on arrose, qu'on nourrit, où l'on
plante, qui nous permet de récolter de bons légumes et de profiter d'un beau
jardin... Mais le sol est bien plus qu'un simple support de culture. C'est un
milieu vivant, abritant une incroyable biodiversité.
La pédofaune : une foule discrète et méconnue
Quand on pense "sol",
en matière de jardinage, on pense surtout : terre, racines,
éventuellement cailloux, argile, calcaire, pH, richesse, humus à la limite... Mais on pense
rarement "pédofaune". Et pourtant, on estime que la faune qui vit dans le sol représente plus
de 80% de la biodiversité animale.
Ainsi, un seul mètre carré du sol d'une forêt de hêtre compte plus de 1000 espèces
différentes d'invertébrés.
Les vers de terre sont sans doute les animaux
du sol les plus familiers pour le jardinier (ils représentent d'ailleurs la
première biomasse animale terrestre : une tonne de vers de terre par hectare de
sol en moyenne, et jusqu'à 4 ou 5 tonnes/ha dans une prairie normande. Il
existe cependant bien d'autres habitants du sol, moins connus...
Microfaune du sol :
diploure
Les principaux habitants du sol
Le sol est un milieu qui abrite des organismes présentant de grandes disparités (taille,
morphologie, anatomie, mode de vie, régime alimentaire...). On classe
habituellement les différents habitants du sol en fonction de leur taille : on parle ainsi, des plus
petits aux plus grands, de microfaune, mésofaune, macrofaune et mégafaune.
Collemboles - Sol
- Microfaune : ce sont les animaux dont le diamètre est inférieur à 0,2 mm, quasiment invisibles à l’œil nu. Leur nom ne vous dira peut-être rien du tout : ce sont des protozoaires, des rotifères, des tardigrades et les plus petits nématodes, ceux-là un peu plus connus (certains sont des parasites des plantes, comme le nématode de la pomme de terre, d'autres sont au contraire des nématodes auxiliaires).
- Mésofaune :
on classe dans cette catégorie les organismes mesurant entre 0,2 et 4 mm. Ce sont surtout des
microarthropodes : acariens, collemboles (vous savez, ces minuscules
bestioles blanches qui sautent à la surface des pots de vieux terreau ? Ce
sont des collemboles, totalement inoffensifs pour vos plantes vertes, et
qui se nourrissent de déchets végétaux), pseudoscorpions, protoures et
diploures, "grands" nématodes (tout est relatif !), petits
myriapodes...
- Macrofaune :
animaux mesurant entre 4 mm
et 8 cm. Les lombrics (les fameux vers de terre), qui font partie
de cette catégorie, sont quasiment les seuls à vivre en profondeur ; et la
plupart des autres organismes de cette catégorie vivent dans la couche supérieure du sol,
notamment la litière (composée de débris végétaux, et donc présente
surtout en forêt) : larves d'insectes (dont les redoutées larves de taupin, de hanneton...), cloportes, myriapodes
(mille-pattes, iules, scolopendres...), limaces et escargots, araignées et opilions, divers
insectes (fourmis, hyménoptères, courtilière...).
- Mégafaune : au-delà de
10 cm. Ce sont les taupes, et tous les "gros"
animaux qui vivent au moins une partie du temps sous terre, par exemple
dans un terrier : marmotte, lapin, mais aussi mulots, campagnols...
- Et puis il y a aussi tous les organismes qui ne passent dans le sol qu'une partie de leur
vie : ceux qui y pondent, ceux qui y restent le temps de leurs
stades larvaires, ceux qui ne s'y enfouissent que pour y réaliser leur
nymphose (comme la chenille processionnaire, qui s'y
métamorphose en papillon), ceux qui s'y réfugient en hiver...
Mésofaune du sol :
collemboles et acariens
Le sol, un vaste terrain d'apprentissage
La science n'a commencé à s'intéresser à la faune du
sol que vers la fin du 19e siècle. Même si, aujourd'hui, les scientifiques
(zoologues, écologues, mais aussi agronomes) ont bien compris le rôle essentiel
que la pédofaune joue dans le maintien de la fertilité des sols et l'équilibre
des écosystèmes, le sol et ses habitants ont encore beaucoup de choses à nous
apprendre !
Pourquoi une telle biodiversité dans le sol ?
Dans le sol, la vie a
dû s'adapter à des conditions extrêment variées ; les organismes se sont donc diversifiés pour
coloniser les différents types de milieux disponibles : profondeur,
climat local, caractéristiques du sol (température, humidité, pH,
granulométrie, composition chimique, richesse en matière organique...).
A noter : comme à chaque strate du sol correspondent des populations spécifiques (par
exemple, certains organismes ne vivent qu'en surface, d'autres à une profondeur
bien précise, le nombre d'individus et d'espèces diminuant avec la profondeur),
on imagine qu'un travail du sol trop profond, pire, avec retournement de la
terre, est tant décrié : retourner la terre dans le cadre d'un labour profond,
c'est perturber ces équilibres fragiles, et c'est donc porter atteinte à la
bonne santé du sol.
Ver de terre dérangé par le
travail du sol
Sol vivant, sol fertile
Toutes ces petites bêtes ne sont pas là pour
faire de la figuration. Elles ont toutes
un rôle important à jouer pour le sol, et notamment sa fertilité.
Sol en bonne santé, fertile
: aéré, sombre
Ainsi, la faune du sol a plusieurs actions :
- Physique, via le
travail du sol : en creusant des trous, des galeries, ou
en permettant simplement le maintien de la porosité naturelle du sol (en
se faufilant entre les particules de terre), ces organismes facilitent son aération, améliorent sa perméabilité, brassent les éléments minéraux et
organiques... Cette action physique favorise la pénétration de
l'eau de pluie en profondeur ainsi que les échanges gazeux, mais également
la croissance des racines des plantes.
- Chimique, via la dégradation de la matière organique (débris végétaux et animaux -> humus ->éléments nutritifs utilisables par les plantes) : les organismes qui se nourrissent des débris végétaux réalisent un travail de fragmentation de la matière organique facilitant l'action des bactéries et des champignons, qui achèvent le processus de dégradation. Ceux qui n'interviennent pas sur la matière végétale ou organique ne sont pas inutiles pour autant : ils sont des maillons de la chaîne alimentaire et contribuent à l'équilibre de "l'écosystème sol".
Un sol vivant, c'est
donc un sol fertile ; et pas de vie du sol sans couverture végétale,
qui fournit, grâce à ses déchets, le gîte et surtout le couvert à bon nombre de
petits habitants. C'est un cercle vertueux. C'est ce principe de sol vivant
qu'appliquent, avec succès, la permaculture, et que l'agriculture biologique a bien compris.
Ver de terre dans un sol
aéré, perméable
(source : http://www.gerbeaud.com/)
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